mercredi 20 février 2008

"Numéro 17", Hitchcock, 1933 :




Ce film est très représentatif de la passion d’Hitchcock pour les escaliers.
En effet, ils sont le lieu privilégié où se déroule une histoire policière pendant une grande partie du film.(40 min sur les 1h05)
Au moment où ce film est réalisé, le cinéma quitte le muet.
Hitchcock, à travers cette réalisation, parodie un certain nombre de films déjà parus.
Certaines caractéristiques s’y dévoilent : entrée « hitchcockienne », influence expressionniste (ombres provocantes, éclairages projetés,…), rappel du muet (peu de dialogue, plans figés sur le décor, qui prend vie sous l’influence des acteurs.),…
Une atmosphère de huis clos y règne renforcée par le décor de cette cage d’escaliers qui agit comme une sorte de prison où sont retenus les personnages. Ceux-ci y nouent leurs histoires et y cherchent le moyen de s’en sortir.
L’escalier : il s’agit d’un escalier d’une vieille bâtisse abandonnée, à vendre ou à louer. Celui-ci est tout de suite mis en évidence dès l’ouverture de la porte d’entrée. Pas besoin de pénétrer dans la maison pour le remarquer.
Le personnage qui entre, ne parcourt pas tout de suite les pièces de la maison mais reste près de l’escalier, seul son regard parcourt ce qui l’entoure. Mais très vite, il est attiré par cet escalier en bois. Qu’il y a-t-il en haut ? La caméra entreprend lentement la montée de ces degrés.
La rampe, faite de barreaux, représente à la fois, une prison, qui symbolisera l’atmosphère dans laquelle baigneront les acteurs( à un certain moment d’ailleurs, 2 personnages y seront ligotés), de plus on peut remarquer que l’éclairage projette une ombre assez imposante de cette rampe sur le mur, ce qui intensifie cette impression d’enfermement Mais elle est également la partie sécurisante de l’escalier, celle qui nous permet de nous accrocher quand on tombe, où de nous aider quand on gravit les escaliers.
C’est elle qui nous empêche de tomber quand on se penche au-dessus du vide.
Bien qu’on ne voit jamais les autres pièces de la maison, ni celle-ci de l’extérieur, nous pouvons remarquer qu’il s’agit d’une demeure bourgeoise abandonnée. L’escalier en bois, a des barreaux qui ont été travaillés par un menuisier. De plus, il occupe une place assez importante dans le hall, de par ses dimensions, que par sa position. C’est lui qu’on voit en premier en entrant dans la maison, ce qui était une caractéristique à cette époque. Tout le monde ne pouvait s’offrir un tel escalier, ni posséder plusieurs étages, ce que l’escalier induit d’office.
Ainsi, nous sommes en présence d’un escalier de haute société. Nous pourrions le définir comme un escalier hiérarchique, social ou ayant une symbolique de parade, qui sert à exposer sa fortune et à se montrer. D’ailleurs, dans le film, c’est l’escalier qui est, en premier, présenté aux futurs acheteurs de la maison.
Cependant, dans ce cas-ci, la symbolique qui est présente, n’est pas seulement celle qui saute au yeux du point de vue architecture mais il s’agit de ce que Hitchcock a voulu nous faire ressentir, c’est-à-dire l’angoisse.
L’escalier permet aussi, tout en restant dans un même lieu, de jouer sur plusieurs niveaux.

Hitchcock :


Hitchcock est sans conteste un des plus grands réalisateurs de films de suspense
Les escaliers sont des espaces fréquents dans tous ses films.
Mais les réflexions qu’ils nous inspirent, sont à chaque fois différentes.
Le suspense s’y plante au fur et à mesure de l’évolution du film, au fur et à mesure qu’on gravit (ou descend) les marches.
Le temps et l’espace y sont déformés, étirés ou condensés.
Voici déjà une brève analyse de 3 de ces films dans lesquels le rôle de l’escalier est assez marquant : Numéro17, Vertigo, Psycho.

mardi 19 février 2008

Nosferatu de F.W. Murnau, 1922 :


La reproduction du surnaturel amorce par la dégradation progressive du réel au profit de l'inconscient.
Cette avancement se manifeste par l’ abandon accentué de l’éclairage.
Dans ce film, la scène d’escalier montre Nosferatu gravissant les marches pour rejoindre Nina dans sa chambre. L’escalier n’est pas montré directement mais est sous-entendu par un jeu d’ombres projetées sur le mur, tout comme celle de Nosferatu. Ce procédé intensifie encore plus le sentiment d’angoisse . (On sait qu’il est là mais on ne le voit pas)
Ce jeu d’ombres crée également une tension.
L’ombre, formée de courbes de Nosferatu, vibre avec celle de la rampe, constituée de lignes droites.
Les courbes représentent un côté imprévu, inconnu, et engendrent une certaine peur comme Nosferatu.
Tandis que les lignes droites, régulières et parallèles de la rampe sont plutôt rassurantes comme l’est une rampe qui sécurise un escalier.
Cette mise en scène est typique du courant expressionniste allemand : projection du décor, comme l’est l’inconscient tourmenté, l’ombre est le double de l’homme.

Escaliers effrayants :


Escaliers « effrayants », de suspense, d’horreur, d’angoisse, de chute :

Un des premiers rôles des escaliers qui nous vient à l’esprit, et qui est très développé dans les films, est celui symbolisant l’angoisse, la peur.
Sans doute que ces marches inspirent la peur de par le risque de tomber que l’on encourt en empruntant ces degrés. Cette peur qui nous prend, de rater une marche et de s’écrouler en bas de ces fameux escaliers, la peur du vide.
Mais aussi, l’appréhension de ne pas savoir ce qui se trouve à l’autre niveau, ce que l’on ne voit pas mais vers ce que l’escalier nous emmène sans aucun détour.
Murnau, Hitchcock,M. Night Shyamalan, Eisenstein, Brian de Palma, et bien d'autres l'ont vite exploité dans leurs films.

Méditation...


Symbole d'élévation spirituelle, l’escalier se retrouve dans «Le Philosophe en méditation» de Rembrandt (1632). Ce tableau présente un escalier en vis qui s’élève. Le haut de celui-ci se trouve dans la pénombre, ce qui nous empêche de distinguer ce qui s’y trouve et maintient un certain mystère. Qu’il y-a-t-il en haut de ces marches ?.Un philosophe réfléchit, sagement assis dans le creux de cet escalier. Néanmoins, c’est l’escalier qui est l’élément le plus important du tableau, de par sa position centrale.
Nous pouvons voir un rapprochement également dans cet escalier à vis et l’hélice de l’ADN. Celle-ci fait partie des sciences et donc de la connaissance, ce qui nous ramène au philosophe, personne très cultivée, et l’élévation spirituelle. Il faut monter pour atteindre le savoir.
Un autre peintre, Salomon Koninck, a également exploité ce thème dans son œuvre :« Philosophe au livre ouvert ». Ce tableau, bien que très similaire à celui de Rembrandt, a quelques différences. Dans ce cas-ci, ce n’est plus l’escalier qui occupe le centre du tableau, mais le philosophe. Ainsi, la symbolique est la même que chez celle de Rembrandt mais cet effet semble moins fort dans ce cas-ci. Le chemin de la méditation est tracé, mais il reste néanmoins obscur et accidenté….

Déjà dans le passé...












Avant de présenter quelques films mettant en scène ces escaliers, un petit détour dans l’histoire et la religion s’impose.

Dans un premier temps, une symbolique religieuse, spirituelle est apparue.
L’escalier transporte le corps mais aussi l’esprit, et est le témoin de la démarche spirituelle.
Il rassemble les opposés, lie, unit le ciel et la terre.
Cette symbolique reste encore très présente actuellement
Dans la mythologie grecque, nous pouvons évoquer la descente d’Orphée dans les profondeurs infernales ; dans la Bible, l’échelle de Jacob,….
Les temples maya ou les pyramides d’Egypte expriment une progression vers le ciel, vers les dieux.
La forte pente des pyramides insinue qu’elle ne doit être franchie que dans le sens de l’ascension, celle qui entraîne l'homme du monde terrestre au monde céleste.
Les différents niveaux de la pyramide symbolisent les divers paliers de spiritualité à atteindre.
Dans nos églises, un grand nombre d'entrée se situe en haut de quelques marches, parfois une, parfois 20 ainsi que 2-3 marches séparent le parterre de l'autel, en quelques sorte pour se rapprocher de Dieu.

Présentation: Sta(i)rs


Ce blog parlera des escaliers. Mais pas dans son simple rôle de descendre ou monter des marches mais de toutes les symboliques qui le caractérisent.
Sta(i)rs !
Pourquoi ce titre? Il s’agit d’une combinaison de « Stairs », qui signifie escaliers, et de « Stars », mot qui désigne notamment les célébrités du monde du cinéma.
Une seule lettre seulement différencie ces 2 mots. Mais c’est tout !
En effet, les escaliers possèdent de nombreuses symboliques, métaphores. Et beaucoup de réalisateurs l’ont remarqué et en ont fait usage dans leurs films. L’escalier n’est plus un simple décor, un lieu de passage mais est devenu un acteur à part entière.
En peinture, sculpture, littérature, il en est de même.
Désormais, l’escalier a sa place sur les affiches de films, presque autant que les autres acteurs.
Car, the « Stair » est une « Star » !